LETTRE OUVERTE AUX ELECTEURS DE LA 8è CIRCONSCRIPTION SUD-EST MEDITERRANEE
Mes Chers Compatriotes,
Vous avez été appelés la semaine dernière à élire votre député chargé de représenter la si belle et si symbolique 8è circonscription des Français établis hors de France à l’Assemblée nationale.
Vous avez été peu nombreux à m’apporter vos suffrages, et je remercie tout d’abord ceux qui ont eu le courage et la lucidité de joindre leur vote à ma candidature, profondément humaniste, euro-méditerranéenne et centrale, et ceux qui m’ont soutenu et écouté. J’assume l’entière responsabilité de cet échec, qui s’explique par plusieurs facteurs sur lesquels je vais revenir. Mon score a été faible et pourtant je n’en retiens ni amertume ni ridicule. Car ce n’était pas pour moi mon égo qui s’exprimait dans cette campagne, mais des Idées, qui sont à la pointe des combats de demain. Prenons date ensemble.
Mon diagnostic était le bon.
Afin d’éviter le sectarisme et l’abandon de tel ou tel Français établis dans tel ou tel pays plutôt que dans tel autre, et surtout de pouvoir peser efficacement pour faire avancer les sujets de nos Concitoyens du Sud-Est Méditerranée, j’avais depuis février 2013 exprimé l’importance d’élire un député habitant Paris, comme moi. Vos suffrages ont rallié cette position, pourtant décriée par les presses locales et certains des candidats indépendants qui voulaient faire de leurs pays d’habitation une arrière-boutique, au détriment des autres. En effet, les 2 concurrents du second tour sont basés à Paris !
De plus, j’avais diagnostiqué les 3 niveaux d’actions du député élu :
– Voter des lois nationales. J’ai toujours dit et écrit que, vu l’état de notre pays, élu, je voterai toutes les lois qui me semblaient nécessaires et justes et me battrai pour le respect de l’éthique et de la responsabilité.
– Faire avancer les Français de la 8è Circonscription, qui souffrent de plus en plus de crises économiques, politiques, sociales et de sociétales – que j’avais été le seul à diagnostiquer et les évènements actuels me donnent raison – et qui se sentent délaissés et mal compris par la France et les autres Pays de la région.
– Apporter une aide aux différents acteurs diplomatiques, politiques, éducatifs, culturels, économiques et associatifs, pour améliorer les conditions de développement, de travail, d’action et de vie de mes Amis français habitant la Méditerranée.
Peu, parmi les nombreux candidats à cette élection de 2013 (30 prétendants, 20 candidats au final), ont développé un programme réaliste sur ces 3 niveaux d’actions. La plupart se sont concentrés sur le 3è niveau, du fait notamment de la multiplication des candidatures locales qui se revendiquaient pour certaines ouvertement clientélistes. Et encore, dans ce focus ultra-nationaliste (non pas dans le sens extrémiste mais surtout dans le sens égoïste ou égocentrique), les candidats de cette eau se sont présentés comme s’ils étaient seuls contre tous à défendre les intérêts particuliers, comme si il n’y avait ni consulat actif, ni représentant AFE, ni association dynamique et structuré, alors que beaucoup n’avaient – heureusement – pas attendu la création de ces députés de l’Etranger pour agir en faveur de leurs voisins et Compatriotes.
J’ai été dans cette campagne le seul à connaître tous les Pays de la Circonscription avant même l’élection, et du coup le seul à proposer, au-delà d’un programme politicien, un axe central concernant tous les Pays à la fois. En effet, ma proposition du « Forum-Développement de la 8è », qui consiste à mettre en valeur les réussites éducatives, culturelles, sportives, économiques, entrepreneuriales, culinaires, associatives et sanitaires des Français de la Circonscription, par une caravane annuelle faisant poste dans les 25 grandes villes de Paris jusqu’à Jérusalem, intègre à elle seule une double exigence : proposer des leviers communs à ces Pays si divers et si méfiants ; faire connaître les uns aux autres car ces Pays sont culturellement proches mais s’ignorent de plus en plus et laissent perdurer des rapports ultra-tendus. La région souffre de l’ignorance réciproque, exacerbée par ces temps de crise ! J’aurais aimé plus de propositions, et même simplement plus de propos en ce sens dans cette campagne. Bref j’aurais souhaité plus de hauteur de vue… En vain !
Je reste persuadé, malgré mon échec, que, au-delà des attitudes partisanes, les « 3 E » développés dans mon programme restent des engagements indispensables pour les Français de la Méditerranée.
Mon programme en « 3 E » était le bon
Le premier E de L’Education, c’est-à-dire l’école, l’université, la formation professionnelle, la recherche, la culture, les bourses, le statut des professeurs, la mise en place sérieuse des programmes FLAM, les Instituts, les Alliances, la Francophonie, est la base de tout. Le Français a des choses à dire : Au-delà d’une langue, c’est un état d’esprit, une culture, une vision du Monde.
Le deuxième E de L’Entreprise, qui porte l’économie, la croissance, l’innovation, la limitation des impôts, l’échange, les exportations, le renforcement des chambres de commerce, et qui amortit les boycotts privant du meilleur les boycotteurs et d’argent les boycottés, dans un cercle perdants-perdants, au lieu du dialogue et de la connaissance gagnants-gagnants.
Et le troisième E de l’Entraide, soit la jeunesse à aider, l’environnement à préserver, les associations à soutenir, les maisons de retraites francophones en Israël, en Grèce et en Italie à promouvoir, la communication, la connaissance, la paix dans le dialogue et aussi dans cette période de stagnation où le passeport français n’est pas un bouclier anti-crise, l’aide au retour avec priorité au logement et à l’emploi pour les Français qui souhaitent revenir en Métropole et qui sont sans moyen.
Ces « 3 E » sont en cohérence les uns avec les autres. L’éducation sert à terme l’entreprise, et aider son prochain à se remettre sur les rails en ces temps de crises pourra lui permettre d’être utile à la collectivité rapidement! Je ne vais pas ici refaire le résumé de mon programme. Mais je veux juste dire que mettre de la cohérence entre ses 3 E indispensables, c’est la base de l’humanisme que j’ai incarné dans cette élection. Leurs échos se feront entendre bientôt aux oreilles et au cœurs de tous !
Enfin, après le fond, où je persiste à penser que mes engagements humanistes et euro-méditerranéens étaient les bons parce que sincères et réfléchis, il y a la forme… Et c’est sans doute là où je me suis trompé et qui vous a conduit à vous abstenir, à ne pas m’entendre ou à voter pour d’autres, que je salue qu’ils aient fait un score supérieur ou inférieur au mien, car ils ont fait vivre la démocratie, et qu’être candidat dans un tel contexte surtout est courageux !
Ma communication était la pire.
En effet, je suis parti en campagne en étant malade, sans moyen, et en refusant les aides diverses que l’on voulait m’apporter sur la base de mes propos humanistes et rassemblant. Pour ma première campagne, je voulais ne pas déranger les bénévoles qui voulaient s’impliquer pour moi, et donc devais consacrer beaucoup de temps à tout faire : le programme, ce qui est normal pour le candidat sauf pour ceux qui répétaient celui de leur parti sans réflexion, sans adaptation et sans autonomie en risquant de prendre en otage d’idéologie ou de batailles franco-françaises, des Français expatriés, les dégoûtant d’autant plus encore de la politique. Mais aussi, l’organisation des voyages (je suis le seul à m’être rendu dans tous les pays de la circonscription, par respect pour les électeurs et pour prendre les dossiers en main de manière concrète), la couleur des affiches (sans photoshop par franchise et cela se voit), le grammage de la profession de foi, le choix des prestataires informatiques (qui m’ont fait subir en 2 mois 38 pannes et qui ont multiplié les fautes dans la précipitation d’une campagne et que le candidat doit seul assumer), les rencontres avec la presse (qui a plutôt été honnête, sauf la presse nationale, inféodée et méprisante, et certains acteurs locaux, soumis à leurs amitiés ou leurs besoins financiers d’annonceurs. Et les plus donneurs de leçons sont les moins fidèles à leurs « bandes annonces ». J’ai voulu, selon mes convictions humanistes, unir plutôt que diviser, rassembler plutôt que de stigmatiser, écouter plutôt que de cliver. La presse n’aime pas car cela ne fait pas vendre ! C’est donc à l’aune de ce prix à payer que notre démocratie doit être évaluée. Les électeurs doivent en avoir conscience.
J’ai refusé de parler de moi, de ma personne, de ma famille, de mon métier, ce qui m’a été reproché par beaucoup. Je voulais faire passer les Idées avant tout et donner de la hauteur au débat. Autant par pudeur que par conviction éthique. Mon entourage me poussait à dire mon expertise et mes combats, à souligner mes compétences, à interpeller sur la pertinence de mes écrits, même les plus anciens qui ont été d’une clairvoyance prouvée. « On ne peut pas voter pour quelqu’un qui agit beaucoup, mais qui ne s’affiche pas » ; « On veut connaître son futur député comme son voisin, ses idées sont secondaires » me soufflait-on. On avait certainement raison et je veux bien admettre mon tort flagrant sur ce point ! Mes activités de chef d’entreprise, d’économiste, de professeur de grandes écoles, de responsables d’associations éducatives ou économiques, auraient pu me donner avantage. Mais j’ai voulu privilégier le fond. Les « E » de mon programme face au « E » de l’Ego de certains autres. Et le plus révoltant c’est que les candidats les plus soutenus sont ceux qui ont eu le programme le moins réaliste et le moins travaillé. Et en plus ils ont pour la plupart tenu des propos contradictoires, selon l’auditoire ; tantôt pro-mariage gays affichant jusque dans leur profession de foi et leur site internet les images des tenants les plus engagés du mariage pour tous ; tantôt dispensant des discours virulents anti-mariage pour tous, devant une foule de manifestants religieux sincères. D’autres, parfois les mêmes, crient à l’égalité hommes/femmes et affichent un tandem 100% masculin aux électeurs. Ils ont joué des cordes religieuses ici et là-bas, en se revendiquant pourtant des partis les plus laïcs. Enfin, des dirigeants étrangers – qui ont le droit d’avoir comme chacun des préférences personnelles – se sont même permis de s’ingérer dans cette élection nationale. Si un dirigeant français en ce 21è siècle en avait fait autant dans ce Sud-Est Méditerranée, nous aurions entendu hurler des loups, des hyènes, des chiens et des canards sauvages pendant des années. Qui sont alors trompés ? Les électeurs, les militants, la France ? Leurs soutiens parisiens ont-ils bien pesé tout cela ou pensent-ils que leurs propos n’engagent pas leurs actes ? Les électeurs sont aussi responsables avec les moyens d’informations actuelles de se laisser berner. Mais ils peuvent et doivent se ressaisir d’ici le second tour. C’est leur devoir, pour faire valoir leur droit. Je n’ai pas voulu tenir plusieurs discours dans cette campagne. Un pour tous, et non un par pays, voire par ville, comme certains candidats ! C’est du marketing ultra-fin ! Quel est leur socle de réflexion, quelle est la colonne vertébrale de leur enrôlement ? Ont-ils des ambitions collectives ou seulement pour eux-mêmes ? seulement ?! Les réponses sont limpides, mais il faut constater que ceux-ci m’ont devancé dans vos suffrages. Donc qui a raison, qui a tort ? Faire de la politique c’est anticiper ; les « 3 E » de mes engagements seront d’actualité, de plus en plus. Ceci promet d’autres rencontres ensemble…
Mais il faut surtout avouer que ma plus grande faiblesse et mon erreur évidente furent pour moi de ne pas avoir été soutenu par un parti. Je pensais que les partis qui avaient collectivement ou tour à tour mis la France et le sentiment européen à genou et qui méprisent dès l’élection leurs promesses, ne pouvaient pas être choisis dans cette élection où le politicien pouvait être contourné pour donner un vrai message humaniste à toute la classe politique. Je soulignais que les partis politiques français – dont les militants ne représentent que 1 % des électeurs et 0.03% dans la zone en question – ne pouvaient pas imposer tel ou tel candidat à 110.000 électeurs inscrits. Que 2 élus sur 3 en France étaient sans étiquette. Que le parti politique le plus populaire en France jouissait de 70 % d’opinion… défavorable, au milieu de marécage d’affaires nauséabond. Que l’on pouvait être élu sur l’indépendance, quitte à rejoindre un groupe pour in fine mieux servir les Français de la 8è, mais en conservant liberté et position de fond. Je m’étonnais même que des candidats plus médiatiques voulaient à tout prix se raccrocher à des partis, quitte à en briser les codes, à en enfreindre les règles et à piétiner leur ADN. Les partis assez lâches ou assez retors faisaient semblant de ne rien voir pour mieux en toucher les bénéfices après. Ainsi a-t-on eu à un moment de l’élection 4 candidats UMP revendiqués, et 3 candidats soutenus par l’UDI affichés… Jusque dans leurs interviews, sans qu’aucun état-major n’eût dit quoi que ce soit. Dans cette auberge espagnole, les électeurs étaient censés se perdre. Tel fut le pari des candidats affichés indépendants. Peu l’étaient en réalité mais il leur fallait être courageux, plus en tout cas que ceux qui ont remis le peu d’idées qu’ils avaient au placard en échange de celles parfois destructives et rétrogrades des partis qu’ils ignoraient quelques semaines plus tôt. Je salue ceux – notamment en Israël – qui ont assumé cette indépendance jusqu’au bout et ont mené une belle campagne. Mais il est évident que eux et moi avons eu tort dans l’analyse. Les électeurs ont privilégié les partis, dans cette partielle en Méditerranée comme dans celle d’Amérique du Nord. A chaque interview, à chaque rencontre avec les électeurs, y compris avec les plus jeunes, la première question m’était posée était : « De quel parti êtes-vous ? ».
Je trouvais cela ringard et décalé mais j’avais moi manifestement été en décalage (ou trop en avance, selon que l’on veuille me donner le beau rôle sur ce point). Dans cette déperdition de la confiance en la politique, les électeurs s’abstiennent (88% d’abstention, 92 % en Israël, avec pourtant deux tiers des candidats qui y faisaient exclusivement campagne) ; les votants élisent des partis même si ils crachent sur eux, autant que eux les dénigrent une fois l’élection acquise ! Ce n’était pas ma réflexion. Autant sur le fond je sais que j’avais raison ; autant sur la forme j’avais tort et je dois le reconnaître. Je voulais que les électeurs dépassent les clivages, au service d’un projet plus grand que nous, au service d’une France plus forte et d’une Méditerranée plus unie. Ils ont suivi d’autres chemins.
Mes chers Compatriotes, mes chers Amis, la démocratie a ses forces et ses faiblesses. Mais si on doit l’améliorer, on doit tout d’abord la respecter. La commission électorale a certes relevé plusieurs manquements aux règles élémentaires. Mais aucune contestation officielle n’est venue à son secours. Et je pense en définitive que les scores n’auraient pas changé de beaucoup. Je souhaite donc avant tout que vous fassiez le meilleur choix possible au second tour, et je souhaite bonne chance à l’élue ou à l’élu. Avec 20 candidats en définitive, j’aurais voulu 10 vainqueurs dans cette élection : Les Français des 8 Pays de la circonscription, ma candidature et la Méditerranée. Je souhaite maintenant, aussi ambitieusement – et j’espère que vous vous joindrez tous à moi de manière républicaine et humaniste, dans un contexte de crises et de perte de repères dans un Monde en mutation féroce – surtout bonne chance à la France !
Bien Amicalement,
CYRIL BENJAMIN CASTRO
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