De nouvelles têtes: attraction des élections
By DAHLIA PEREZ, KATHIE KRIEGEL
05/21/2013 13:15
Représenter les Français à l’étranger : un mandat qui attire et fait rêver aussi bien les vieux routiers communautaires que les idéalistes.
Cyril-Benjamin Castro. Photo: DR
A quelques jours de ces élections qui verront l’élection du candidat représentant, à l’Assemblée nationale, les Français de la 8e circonscription, on peut glaner encore, et de manière non exhaustive, détails et révélations inédites sur les parcours des indépendants qui restent dans le peloton.
Les prétendants au poste sont nombreux, et dans la vague des « sans étiquette » dont les candidatures demeurent encore confidentielles ou mal connues, émergent quelques personnalités qui ont su mettre en avant leur singularité ou leurs affinités avec les électeurs qui voteront notamment d’Israël.
Parmi eux, Albert Fratty en est le premier exemple. La figure qui se dessine ici est celle du bon père de famille, vivant à Netanya, fief francophone, et qui s’est « fait » tout seul tout au long d’un parcours d’autodidacte. Ce franco-israélien, entrepreneur qui a réalisé son aliya dans les années 1980, a fait notamment partie des pionniers de la presse francophone. Il rassure. A lui, les voix des résidents retraités de la pimpante station balnéaire, pour lesquels, sans nul doute, il saura retrousser ses manches, et défendre les droits. Car pour convaincre, il faut savoir mettre en avant, si on est doué pour cet exercice, un petit accent de proximité.
A savoir, références culturelles et identitaires familières aux électeurs. Même langage, en filigrane.
Sur le terrain de l’empathie avec les électeurs, un nouveau visage, celui de Nathalie Mimoun, résidente de Netanya elle aussi, et installée en Israël depuis 1986. La battante, la femme active qui projette l’image d’une intégration réussie, et généreuse. Médecin de métier, elle fait valoir son sens de la solidarité et insiste sur sa capacité à s’imposer. Favoriser les échanges culturels franco-israéliens, monter au créneau pour une fiscalité adaptée aux résidents français à l’étranger, c’est son credo.
Entre idéalisme et discours convenus
Dans les candidatures revendiquant clairement la couleur franco-israélienne, retenons celle de Guy Fitoussi également, avocat international, et qui insiste sans complexe sur son statut d’indépendant. Slogan : renforcement du système juridique, défense des droits des Séfarades en Israël, intégration d’Israël au sein de l’Union européenne. L’homme met en avant sa double culture, et son attachement à l’Etat hébreu évidemment. Sans oublier, de manière un peu convenue, de fustiger « les autres candidats à la solde des partis politiques et qui ne cherchent qu’à exploiter les électeurs ». Bigre… Cyril Benjamin Castro, profil avenant, visage affable, et européen en diable, revendique des attaches dans les huit pays de la circonscription. D’emblée, il se pose comme le défenseur de tous les résidents français installés à l’étranger, « l’alternative positive » dans une campagne ou « personne, à part lui, ne prend le recul nécessaire pour appréhender tous les dossiers ». Castro met en avant ses compétences, le fait qu’il a travaillé plusieurs années hors de France. Rompu aux questions d’économie européenne, et aux enjeux sociaux de tous ceux qui détiennent un passeport français et qui « ne sont pas épargnés par leur nationalité, qui n’est pas un bouclier anticrise ».
Déjà moins proche de nous, Julien Lemaître, silhouette frêle mais convictions bien arrêtées, se présente sous la bannière de « Solidarité et Progrès », la formation politique de Jacques Cheminade. Ce lyonnais, web-designer indépendant, a tout du profil de l’autodidacte qui a tracé sa route en franc-tireur.
Ce trentenaire se veut proche des électeurs de sa génération, dont l’une des caractéristiques est d’être nés avec la crise.
Tordre le cou à cette fameuse peur de l’avenir, l’enjeu est là. Son action : « mener un combat politique pour restaurer une dynamique de développement des infrastructures et de l’industrie de pointe sur l’Eurasie et dans le bassin méditerranéen notamment ».
Un de ses combats, la lutte contre l’effondrement d’un système financier par l’adoption d’une loi de séparation stricte des métiers bancaires. Pour bâtir « un monde sans la City ni Wall Street, c’est-à-dire sans la mainmise d’une oligarchie financière sur le destin des peuples. » Une petite musique aux relents d’Internationale qui a de quoi surprendre – et émouvoir ? – sur les chemins très balisés du discours politique. Et l’idéal, et l’utopie ? Fédérer l’Europe du sud, résoudre les problèmes d’une communauté de Français disséminés dans cette fameuse circonscription, avec une véritable vision, est-ce encore possible ? Autre visage peu connu, et sympathique, celui de Frédéric Chaouat. Enseignant, proche d’Israël, baroudeur polyglotte citoyen du monde, le candidat se veut riche de toutes les cultures dont il est parti à la rencontre. Chaouat insiste sur une candidature qui « est avertie des problèmes majeurs auxquels se heurte la population franco-israélienne […] mais dont l’objectif est d’être toujours à l’écoute des difficultés majeures des Français vivant dans les autres Etats membres de la 8e circonscription ».
Proche de la communauté, et notamment du mouvement habad, ne craignant pas de faire référence à la Torah et à des épisodes bibliques pour fustiger l’opportunité de personnalités politiques bien en vue, l’homme se veut un représentant sincère et dévoué de la cause des Français de la 8e circonscription. Mais le contenu du programme, au-delà des voeux pieux, reste à définir… De Sylvain Semhoun, qui a créé le buzz pour avoir soutenu le FN dans sa quête de signatures, on sait finalement peu de chose. Profession de foi laconique, même si on sait qu’il est un élu de l’Assemblée des Français à l’étranger et que, de ce fait, l’homme « connaît parfaitement les problématiques de ses compatriotes qui résident hors de la métropole ».
Encore faut-il pouvoir communiquer et créer le débat sur ces fameux problèmes… Comment ne pas s’interroger sur la crédibilité de certains candidats à apporter un nouvel éclairage sur les problèmes de fond, alors même que sur les moyens d’action, tout reste flou et à définir ? Une connaissance des « dossiers » qui reste certainement encore à acquérir pour certains, en dépit de la légitimité (revendiquée) de leur candidature.
Les partis, entre pouvoir et contre-pouvoir
Les politiques fatiguent ; on en doute, on s’en lasse, on n’y croit plus. Bousculés par les indépendants qui s’invitent sur leur pré carré, ils n’ont pas le vent en poupe. A droite, chacun fait cavalier seul. L’UMP (Union pour un mouvement populaire) peine à rassembler, puisque sa formation produit deux candidats, Bezardin en Italie, Valérie Hoffenberg en Israël. Attaquée de toutes parts, celle-ci est suspectée de pratiquer le double discours et se retrouve en fin de campagne en procès contre nombre de ses détracteurs. Malgré un parcours sans faute et un CV exemplaire, elle semble boudée dans son dernier tour de piste, et sur son site internet « comments are closed », les commentaires n’ont plus lieu d’être, autrement dit le débat est clos.
Meyer Habib lui, un étalon entré dans la course sur le tard, voit sa cote en hausse et semble en position de pouvoir porter son parti centriste UDI RFE, en tête de peloton, talonné de près par un autre poulain centriste, Jonathan- Simon Sellem du PLD (Parti Libéral Démocrate). A gauche aussi chacun roule pour soi en formation dispersée ; Marie-Rose Koro, parti socialiste, en Turquie, est en tête des forces de gauche, suivie dans le désordre par Julien Lemaître, Solidarité et progrès et Michèle Parravicini, Front de gauche.
Athanase Contargyris bien que du parti EELV (Europe Ecologie Les Verts), a tout de l’électron libre en quête d’une orbite.
Enfin le Parti Pirate, grumeau dans la soupe électorale, affiche sa volonté de jouer les trouble-fête et défend la protection des libertés individuelles, l’exemplarité démocratique, le partage de la culture, la valorisation de l’entrepreneuriat et la lutte contre les connivences et la spéculation. Il appelle tous les Français de l’étranger, que ce « cirque politique fatigue et agace », à le rejoindre, et tire à vue sur la droite, le centre, la gauche et à bout portant sur les indépendants, « ce mélange de stars du tube cathodique et d’ex-porte-flingue en recherche d’emploi donne le tournis.
Où est le sérieux du débat politique ? Où sont les intérêts des Français de l’étranger ? », s’interroge Véronique Vermorel, candidate dans la première circonscription. Dans la 8e, le Parti Pirate est représenté par Alix Guillard.
Bien qu’il affiche ne pas vouloir laisser les grands partis monopoliser le débat public, il a fait la course à l’élection en sourdine, une « campagne à zéro euros », qui se veut à l’opposé des campagnes people. Finira-t-il aussi la course avec zéro voix dans le giron ? Possible ! Et vogue la galère…
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